Ɛhyɛn City, comme un alter ego ouest-africain de la Motor City américaine où, plutôt que de cracher des automobiles flambants neuves de chaines d’assemblages automatisées, les véhicules promis à la casse renaissent grâce à l’ingéniosité d’une toile dense de garagistes, mécaniciens, importateurs et revendeurs. Ici, la nécessité se substitue à l’abondance : les gestes, dictés par l’absence de moyens, prolongent la vie des voitures bien au-delà de ce qu’autoriserait les économies occidentales fondée sur le jetable. Un recyclage qui, loin de tout programme écologique formel, esquisse pourtant une pratique durable : avec des moyens réduits, une énergie limitée, et une inventivité sans relâche, ces artisans retardent l’obsolescence par la force de leurs mains.
De leurs ateliers émergent des véhicules composites, assemblés à partir de pièces hétérogènes, réminiscents des grands gestes du Nouveau Réalisme ou de l’Arte Povera. Comme les compressions de César ou les assemblages de Duchamp, ces « frankencars » interrogent la frontière entre réparation et création, entre nécessité et art. Bien que fruits d’un contexte de dénuement, ils révèlent une dimension créative et humaine souvent absente de la société de surconsommation : faire durer plutôt que jeter, transformer plutôt que remplacer.